Période du 4 mars au 1er septembre 1968

 


 

 
Avec une pensée pour Jean-Louis PIDAL disparu à bord de l'Eurydice.

1er rang : Turpin - Pacheu - Squillari - Pidal / 2ème rang : Roucou - Ruelle - Mello

 

 

 

        

 Lors d'une première année au lycée, entre marine marchande et marine nationale, le choix s’est fait pour le port du pompon. Le mardi 4 mars 1968 au petit matin, à peine descendu du train en gare de Toulon, me voilà pris rapidement en charge par une équipe d'accueil armée de la traditionnelle pancarte indiquant "Ecole des apprentis mécaniciens". Les lieux me sont familiers, étant le 3ème marin de la famille et venant régulièrement en séjour dans ce port de guerre.

 

 

 

       

Pour mémoire, à ce jour, c'est l'Amiral PATOU qui est le Chef d'Etat-Major de la Marine.

Par groupes de jeunes recrues rassemblés dans le hall de la gare, nous partons en empruntant l’avenue Vauban et en longeant le cercle de garnison et le cercle naval. Nous traversons la place d'Armes où s'est déroulé quelques jours avant, le 8 février, la cérémonie à la mémoire des disparus du sous-marin "Minerve".
 
Après avoir laissé sur notre droite l’entrée principale de l’arsenal, et sur notre gauche le quartier de la basse ville surnommé "Chicago",  nous arrivons sur le quai Stalingrad qui a remplacé le quai Cronstadt  entièrement démoli en 1944.

 


 

 

Gare de Toulon

Quai Stalingrad et Préfecture Maritime

 

 

       

Nous embarquons à bord du transport Pipady et partons en direction de la presqu'île de Saint-Mandrier. A peine quitté le ponton proche de la Préfecture Maritime,nous sortons du carré du port,  et nous longeons le groupe école de l'artillerie l'impressionnant cuirassé Jean Bart qui fait partie l'attraction des touristes et représente bien le port de guerre de Toulon.

 

 

 

 

 

Le Pipady

Le Cavalas (sister ship du Pipady)

 Le croiseur Jean Bart  Le Groupe école Jean Bart, Montcalm, Océan

 




 

 
 Vue du GEM

 

   

 A quelques pas de la darse de l’école, nous voilà face à l’ancien Hôpital de la Marine dont les édifices impressionnent les jeunes que nous sommes.

Pour mémoire, les chauffeurs pour le service des bâtiments à vapeur, réunis en compagnie, sont les précurseurs des spécialistes du moment. Apparues en 1831, composées d'ouvriers civils loués, ces compagnies ont assuré l'instruction des matelots non embarqués et constitué ainsi, malgré une médiocre réputation, le premier groupe de mécaniciens.

 C'est en 1840 que le corps des mécaniciens est créé. Les hommes sont engagés en raison de leur compétence ou formés "sur le tas".

En 1886, le premier cours d'apprentis est fondé à Brest, suivi rapidement de deux autres écoles implantées à Toulon et Lorient. Cette dernière école devient, en 1907, le centre principal de formation des mécaniciens;

En 1933, le développement des spécialités liées à la propulsion et à l'électricité impose la mise sur pied à Toulon d'une seconde école d'apprentis qui subsiste avec la précédente jusq'en 1939.
Au lendemain de la seconde guerre mondiale, les différents cours se regroupent dans les locaux de l'ancien hôpital maritime de Saint-Mandrier, face à Toulon, au sein de ce qui est désormais l'Ecole des Apprentis Mécaniciens de la Flotte.

En 1963, les cours réservés aux officiers rejoignent l'ensemble, composant alors le Groupe des Ecoles de Mécaniciens que certains "bouchons gras" qualifient affectueusement de "faculté de la mécanique".

 

 

 

A VOIR

 L'Hôpital de la Marine à Saint-Mandrier

 

 

Vue de l'école et de la darse

 

 

L'entrée du G.E.M.

La cour d'honneur

 
 Entrée du personnel avec le BSI Le Parloir
   
 Bâtiment A : Maistrance et bar des choufs Bâtiment E : Engagés d'Hourtin 

 

 

   

 Une fois débarqués, nous nous dirigeons vers l'aubette et nous arrivons dans la cour principale. Les valises sont ouvertes, inspectées et débarrassées éventuellement des objets sans rapport avec notre futur séjour. Puis direction le 2ème étage du bâtiment C pour être hébergé provisoirement dans la compagnie 3B avec pour adjudant le maître RICHARD surnommé Bonanza. La chambrée comporte environ 110 couchages constitués de lots de 3 lits superposés écartés les uns des autres de 50 cm. Le temps des hamacs était révolu.

Rapidement nous sommes dotés d'une tenue de couleur verte comportant une ficelle comme ceinture et peu de boutons, ces derniers étant la proie favorite des anciens.

 

 

 

 Le CV LOVY, commandant du GEM  Le Bidel (Chrismo)
 
 Le bâtiment des OM  Le bâtiment des classes de cours

 

La Chapelle

 

  Montée de la Chapelle  Montée de la Chapelle

 

 

   

 Après toutes les formalités : séance du coiffeur, tests de connaissances et psychologiques de toutes sortes, visite médicale, tests en atelier, entretien avec le Lieutenant de Vaisseau KHERUEL le capitaine de compagnie, l'admission est officielle. Sous les combles du bâtiment Etat-Major, le 1er sac de marin nous est délivré sans oublier les brodequins pour l’atelier qu’il faudra rapidement teindre en noir et faire briller, la musette et les calots en bleu de chauffe. Le bonnet appelé communément bachi n'est porté que le dimanche.

Je suis désigné pour la compagnie 3C tribord qui se situe sous les toits du même bâtiment. L’adjudant de compagnie est un Maître Principal sympathique du type paternaliste accompagné notamment des Seconds Maîtres JEAN-LOUIS mécanicien et ANDRE manoeuvrier que j’aurai l’occasion de revoir plus tard. La spécialité d'ajusteur m'est attribuée, ayant raté le visé de marteau pour faire chaudronnier et ayant glissé sur les sinus cosinus nécessaires pour devenir tourneur.

 

 

 

 
  Fanion de la 3ème compagnie  Fanion de la 4ème compagnie
Le bâtiment D  Le bâtiment B
   
 Fanion de la 2ème compagnie  

 

1ère coupe

Quelques mois après

 

 

 
   

 

   

 L'école des apprentis mécaniciens a pour mission de nous faire obtenir en une année de formation un des CAP des spécialités précédemment annoncées. Les matinées sont dévolues à la formation théorique, enseignement général compris, et les après-midi consacrées aux joies de l'atelier.

Le programme des activités est réglé comme du papier à musique sur deux semaines.

- à tour de rôle c'est la corvée de bidon, qui consiste à se lever le plus tôt possible pour être le premier servi en cuisine afin de délivrer à ses camarades de table le jus et les brioches occasionnelles qui baignent dans la compote de pomme;

- les repas à heures précises selon les compagnies commencent par une attente dans la cour principale, un déplacement au pas cadencé vers les escaliers montant au réfectoire, la course vers une des deux rampes, le garnissage des plateaux en aluminium, le remplissage du quart de vin, le repas à grande vitesse bousculé par les équipes de nettoyage des tables afin d’accueillir les suivants, et le vidage des plateaux à la souillarde, les restes étant destinés aux cochons;

- un jour sur deux nous avons droit à un branle-bas avancé pour la pratique de l'hébertisme, c'est à dire courrir à jeun dans la colline avec un retour inespéré se terminant toujours par un cri guerrier du genre : "PATO" éructé par le moniteur fusilier, suivi d'un pathétique "GAZ" hurlé par les arpètes éreintés. L’autre jour est consacré au poste de propreté. Le mien se situe au lavoir où par bonheur s’entraîne le bagad;

- une journée de la quinzaine est consacrée au service général. Hormis le souvenir ému d'une journée passée au poste des officiers mariniers, les pluches, le service à table et le siphonage des carafons, le poste de la souillarde équipage, je suis arrivé à me faire affecter à poste fixe comme chargé de la chaudière du réfectoire des choufs;

- la nuit nous assurons régulièrement un quart de nuit dans la chambrée, l’occasion de faire des blagues aux joyeux ronfleurs.

 

 


 



 
   
   
   

 

 

   

La première sortie de l’école a consisté à traverser le village de Saint-Mandrier avec un demi-tour effectué sur la plage des galets. La superbe tenue verte que nous portons doit faire sourire les esprits des anciens forçats qui ont construit notre école.

 

 

 

 

   

Les événements de l’époque font que le mois de mai s’est résumé à la découverte des rations de combat, le renforcement des factions pour l’accès aux ateliers (Halte qui va là ? mot de passe ? etc.), la suppression des permissionnaires est plus grave, la suppression des premières vacances avant signature de l’acte d’engagement.

 

 

 

 

 

   

Les week-ends se succèdent rapidement, deux sacrifiés dans la chambrée pour les piqûres « TABDT » avec une bonne douleur au niveau de l’omoplate et pour ration du lait parfumé à je ne sais quoi, certains à découvrir la vieille ville de Toulon, le célèbre Chicago, en utilisant les transports de rade Cavalas ou Pipady vieux de plus de quarante ans.

 

 

 

 
Bâtiment Infirmerie  Bâtiment des Officiers Mariniers

  

 

   

 La formation militaire a commencé par apprendre à marcher au pas, puis par le tir au fusil : 10 cartouches, 7 dans la cible, 3 manquantes transformées en 30 pompes, vive la tradition.
La formation maritime plus sympathique a consisté à apprendre les nœuds marins et à pratiquer la nage sur baleinière : deux, deux, deux, lève rames, scie bâbord, avant tribord, etc.

 



 

  

   
 
 
   
 
   

 

 

 

 

   

Les distractions se résument à de simples passages dans le foyer faute d’argent de poche (la solde mensuelle s’élevant à 20 francs), à des séances de cinéma gratuites, et principalement à la rencontre des anciens autour d’un des bancs de la cour principale, chaque banc étant généralement rattaché à un des départements français.

 

 

  

   
 La paie du mois  

 

 

 

   

Les avantages, si l’on peut dire, sont la délivrance mensuelle de huit paquets de gauloise, les troupes, accompagnés de huit timbres et de deux bons de colis.

 

 

  

 
 Le timbre  Le bon de colis

 

 

 

La mise en pratique des gammes d’usinage, l’usage de la bâtarde et de la sanguine, la découverte du dudgeonnage sont rapidement interrompus. Je suis admis à CPM, le Cours Préparatoire à Maistrance. Après un oral devant Monsieur Bazin le responsable des professeurs civils (que je revoie encore régulièrement), je suis autorisé à reprendre les études au lycée technique Rouvière de Toulon.

 

 

 

 

   

Le mois de juillet est consacré comme les années précédentes à la préparation de la fête des écoles. Les répétitions sur le stade se succèdent. Après les séances d'entraînement nous avons parfois droit à la baignade du côté de la base aéronavale. Les trajets s'effectuent en chantant en particulier le chant des arpettes (à voir ci-après). Nous sommes dotés dans chacune des mains d’un petit drapeau, ceci pour effectuer des mouvements d’ensemble d’un plus bel effet vu de la tribune d’honneur je suppose. Nous sommes également équipés de maillots de couleurs différentes afin de constituer les lettres G, E et M et les anneaux olympiques.

 

 

 

 

 
   

 

  

 

   

Avant de partir pour les vacances d'août, les admis au lycée technique, ainsi que les deux promotions précédentes sont réunies dans le bâtiment des maistranciers pour suivre des formations maritimes et militaires ainsi que des cours sur les bases de la mécanique auto.

 


 

 

   
   

 
 

 Le Drapeau
 
   

 

 

   

Remis à l'École des apprentis mécaniciens de la flotte (EAMF) le 25 janvier 1985, ce drapeau est l'un des huit "drapeaux en activité attribués à une unité constituée" existant dans la marine. Quatre décorations sont épinglées à la cravate du drapeau rappelant les services éminents rendus à la France par les élèves de cette école.

  • la croix de guerre 1914-1918 avec palme, reçue en 1922 avec citation à l'ordre de l'Armée,
  • la croix de guerre l939-1945 avec palme, reçue en 1953 pour récompenser la bravoure et la conduite des marins mécaniciens et armuriers pendant la deuxième guerre mondiale,
  • la croix de guerre des Théâtres d'Opérations Extérieurs avec palme, reçue en 1955, dont la citation exalte l'esprit de devoir et de sacrifice des marins formés à l'E.A.M.F,
  • la croix de Chevalier de la Légion d'honneur, remise en 1958 par le vice-amiral d'escadre Barjot.

En 1985, la promotion Dupleix fut la première promotion d'apprentis présentée à ce glorieux drapeau qui rappelle le courage et la volonté de servir la France de leurs aînés.

 

 

  

 

 

 Le G.E.M. vu par satellite

 

  

 

 Chant des Arpettes.

1er couplet

Nos anciens ont tracé la route.
Elle mène vers l'avenir.
L'Apprenti jamais ne doute
de la valeur du mot " servir ".
Travaillons de tout notre cœur.
Mécanicien la récompense,
elle est déjà dans la valeur.

Refrain

Quelle est belle, belle la chanson
de la forge, des tours, des machines.
Elle est joyeuse et nous l'aimons
car c'est le coeur de la Marine
qui bat dans le fer et l'acier
à l'Ecole de Saint-Mandrier.

2ème couplet

Que le ciel soit bleu ou qu'il vente
la mer scintille au pieds des monts,
le matin le clairon chante,
chante le jour, debout garçon,
le travail est là qui t'appelle,
souris un bon coup et va t'en,
la vie est longue, rends la belle
mets y la joie de tes vingt ans,

3ème couplet

Ecoute le souffle qui gronde.
Apprentis tu pourras demain
mener fier de par le monde
ton bâtiment de tes deux mains
quand là bas le sac sur l'épaule
tu briqueras toutes les mers,
loin des murs blancs de ton école,
pense au clairon des matins clairs.

 

  

 

 

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